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Le clan balngarra est une tribu autochtone nawurrk1 de la terre d’Arnhem dans le Territoire du Nord, en Australie.

Notre terre s’étend sur environ 250 km2 de savane, d’escarpements et de marécages. La « propriété », le « lien » ou l’ « appartenance » du clan balngarra à cette terre n’a jamais été rompu. Le clan balngarra utilise de nombreux types d’incendies pour prendre soin des personnes et du country.2 Le feu est utilisé pour la chasse et la cueillette, pour cuisiner, pour garder les plantes et les animaux en bonne santé, pour défricher les chemins pour pouvoir y marcher, et est important pour les cérémonies. Pendant la partie froide de la saison sèche, entre avril et août, dans notre langue 3nous l’appelons marluwurru. Lorsque nous voyons des pâturins, gardaykkah 4 fleurir, lorsque le vent nous atteint, le froid arrive – gabekbek. Cela signifie que le moment est venu de brûler, d’ « enfumer » le country. Nous ne laissons jamais le combustible s’accumuler, parce que nous savons que la saison à venir sera warlirr (temps chaud) et davantage de combustible fait d’herbes sèches, de feuilles et de branches s’accumulera sur le sol et provoquera des incendies incontrôlés.

Notre feu est comme un trésor. Lorsque nous pratiquons la gestion traditionnelle des incendies, nous sommes toujours récompensés ; notre country nous redonne des animaux, bush tucker 5et nous pouvons recueillir des lances dans la jungle. Nos Anciens la préservaient comme il faut. Brûler au bon moment n’est pas dangereux.

Puis un jour, des scientifiques balanda Then one time, these Balanda 6 regardaient le country des Bi 7 brûler. Ils ont compris que notre gestion traditionnelle des incendies n’était pas seulement bonne pour la biodiversité, mais qu’elle réduisait également les gaz à effet de serre et le dioxyde de carbone rejetés dans l’atmosphère par les incendies incontrôlés.8 9 10 Les Bi ont commencé à établir des partenariats avec des scientifiques des incendies et ont travaillé ensemble pour mesurer tous les arbres et collecter des données à partir des sites de surveillance. À la fin des années 1990, nous avons lancé le projet West Arnhem Land Fire Abatement (WALFA – Projet de lutte contre les incendies de la terre d’Arnhem occidental)11 12 Aujourd’hui, nous négocions des accords avec tous les groupes de gardes forestiers autochtones de la terre d’Arnhem Land afin qu’ils s’associent au projet de lutte contre les incendies de la terre d’Arnhem (ALFA). Il couvrira une superficie d’environ 120 000 km2, qui comprend des centaines de clans autochtones. Chaque année, nous rassemblons tous les gardes forestiers, les scientifiques et les détenteurs de savoirs afin de planifier les incendies au bon moment. 13ALFA dispose d’un conseil qui supervise le projet et nous employons une formule pour répartir équitablement les revenus. Toutefois, les frontières ne nous inquiètent pas. Nous voulons gérer ce country sans démarcations. Parce qu’instaurer des démarcations, tracer des frontières sur une carte, c’est la méthode balanda.

Dès que les projets d’incendies ont commencé à se développer, tous les gardes forestiers ont reçu une formation de « formateurs agréés ». Ils nous ont enseigné à lutter contre les incendies Tout l’argent des incendies que nous générions était réinjecté dans la lutte contre les incendies par les gardes forestiers Un jour, je regardais des propriétaires traditionnels utiliser le feu pour la chasse et la cueillette dans leur country. Les gardes forestiers commencèrent à s’inquiéter de cet incendie des propriétaires traditionnels, qui aurait pu se transformer en incendie incontrôlé. Ils prirent donc un hélicoptère, survolèrent l’incendie et l’éteignirent. Ce n’est pas bien. Dans la culture bi, nous ne luttons jamais contre un incendie. Ce n’est pas la manière de faire des tribus nawurrk. Nous faisons uniquement du feu, nous ne l’éteignons pas. Cet événement m’a fait réfléchir à ce country et aux propriétaires traditionnels.

Les Bi n’avaient pas travaillé en étroite collaboration avec des scientifiques pour développer une méthode de comptabilisation du carbone. Nous avons uniquement fait un travail de terrain avec les scientifiques. Enregistrer et mesurer, et emmener les scientifiques à différents endroits. Nous n’avons pas été dûment payés. Pour toutes les activités scientifiques menées sur le terrain, porter tout l’équipement et les outils avec les scientifiques, nous avons uniquement reçu de l’argent du CDEP 14. Les scientifiques et les politiciens ont établi cette méthode de comptabilisation du carbone, et nous ont imposé cette règle qui disait que nous pouvons brûler chaque année uniquement en mai, juin et juillet. Le 1er août est le délai pour arrêter de brûler, sinon nous recevons une amende. 16 rendent notre peuple et notre country malades. Elles sont surpeuplées avec de nombreux clans différents, ce qui entraîne des problèmes sociaux. Cela nous inquiète. Mais la bonne nouvelle est que grâce à l’argent des incendies, certaines de nos familles rentrent dans le country. D’une part les projets liés au carbone nous aident à arrêter le réchauffement climatique, d’autre part, s’ils incluent adéquatement les propriétaires traditionnels, ils peuvent nous aider à prendre soin de notre santé, de notre langue, de nos cérémonies, de la biodiversité qui vit avec nous dans le country, et fournissent de bons emplois pour notre population.

Séchage du saumon en Alaska, une activité affectée par le changement des conditions météorologiques, qui ne correspondent plus aux périodes traditionnelles de prise. Photo : Karen Kasmauski.
Auteure/Auteur
  • Forest Peoples Programme
Écosystèmes
  • Forêts tropicales
Thèmes
  • Conservation et utilisation durable
  • Restauration des écosystèmes
Type
  • Forme longue
Date
  • Cette étude de cas fait partie de LBO-1, initialement publié en 2016.

References

  1. Les tribus nawurrk sont expertes dans l’utilisation des nombreux types d’incendie pour parvenir à des buts spécifiques dans le Country, en particulier pour chasser les animaux.
  2. Le mot anglais Country est employé pour se référer aux domaines des clans de peuples autochtones. En Rembarrnga, ils sont désignés par le terme dawal.
  3. La langue parlée par le clan balngarra est le rembarrnga.
  4. Stringybark (Eucalyptus tetradonta) « écorce filandreuse », terme désignant l’eucalyptus australien
  5. Bush tucker est un terme australien employé pour décrire les aliments cueillis dans la nature.
  6. i Balanda est le mot employé par les autochtones de la région de la terre d’Arnhem pour se référer aux non-autochtones
  7. Terme employé par les autochtones qui parlent la langue rembarrnga pour se désigner eux-mêmes
  8. Fitzsimons, J. et al. Insights into the biodiversity and social benchmarking components of the Northern Australian fire management and carbon abatement programmes. Ecol. Manag. Restor. 13, 51–57 (2012).
  9. Culture, ecology and economy of fire management in North Australian savannas: rekindling the Wurrk tradition. (Csiro Publishing, 2009) Yates, C. P., Edwards, A. C., & Russell-Smith, J.
  10. Big fires and their ecological impacts in Australian savannas: size and frequency matters. Int. J. Wildl. Fire 17, 768–781 (2009).
  11. Fitzsimons, J. et al. Insights into the biodiversity and social benchmarking components of the Northern Australian fire management and carbon abatement programmes. Ecol. Manag. Restor. 13, 51–57 (2012).
  12. Culture, ecology and economy of fire management in North Australian savannas: rekindling the Wurrk tradition. (Csiro Publishing, 2009))
  13. Les revenus générés proviennent de différentes sources, notamment plusieurs accords volontaires basés sur le marché avec le secteur privé et le Fonds de réduction des émissions du Gouvernement australien.
  14. CDEP signifie « Programme communautaire de développement et d’emploi », qui est l’ancien programme d’aide du Gouvernement australien ciblé spécifiquement sur l’emploi et le développement des Australiens autochtones.
  15. Gouvernement australien Savanna fire management. (2015) at <http://www.environment.gov.au/climate-change/emissions-reduction-fund/methods/
    savanna-burning>
    [/efn_note]

    Aujourd’hui, nous gagnons pas mal d’argent grâce aux activités liées aux incendies. Nous créons des bases satellites pour les gardes forestiers sur chacun des domaines des clans dans la région des marécages d’Arafura sur la terre d’Arnhem. Ces bases satellites n’obtiennent aucun financement des organisations gouvernementales. Elles fonctionnent grâce à l’argent des incendies. Les propriétaires traditionnels reçoivent un salaire et disposent d’équipement pour les incendies. Ainsi, nous pouvons être certains que les gardes forestiers ne jouent pas les héros en luttant contre les incendies, mais que les propriétaires traditionnels jouent un rôle de premier plan pour s’occuper de leur country.

    Il est très important que les propriétaires traditionnels aient des emplois dans le country. Ce n’est pas un endroit pour passer le weekend, c’est notre maison. Les villes dans lesquelles les gouvernements essaient de nous faire vivre, les « villes de croissance » 15Department of Community Services. Major remote towns – Properly planned and designed towns. (2013) at <http://www.drdia.nt.gov.au/about_us/
    regional_services/major_remote_towns>